The outrun

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2–3 minutes

Nous vous conseillons vivement d’avoir vu le(s) film(s) traité(s) par nos textes, afin de ne pas être spoilé·es et de mieux comprendre nos propos !

2–3 minutes
FICHE TECHNIQUE

Réalisation : Nora Fingscheidt
Scénario : Nora Fingscheidt, d’après le livre L’écart de Amy Liptrot
Année de sortie : 2024

The Outrun est l’adaptation par Nora Fingscheidt du roman L’écart, écrit par Amy Liptrot. Le personnage principal, Rona, est interprété par Saoirse Ronan, également productrice du film ; l’histoire appréhende son alcoolisme, sujet encore tabou auprès de personnages féminins. Après qu’elle ait quitté l’archipel des Orcades (des îles sauvages au nord de l’Ecosse) pour s’installer à Londres, elle tombe rapidement sous l’emprise de l’alcool, et décide donc de retourner vivre chez ses parents. 
La réalisatrice utilise de nombreux outils pour témoigner de l’état du personnage et de l’impact de l’alcool. La scène d’ouverture montre Rona titubant dans un bar et cherchant à boire, l’effet d’ivresse est accentué par une caméra épaule en mouvement. Si ce lieu est un endroit propice à l’alcool, ce dernier est vite installé dans le quotidien. La protagoniste ne boit plus la nuit ou dans un bar mais seule dans sa salle de bain. La caméra, alors, ne bouge plus : ces moments ne sont plus marqués par l’ivresse mais par un besoin, une addiction. On assiste aux nombreux impacts – psychiques et physiques – qu’a l’alcool sur Rona, sur sa vie amoureuse et sur ses proches.
La temporalité irrégulière du film nous fait tenir et compense un scénario parfois faible, traînant en longueur. On navigue entre la vie de Rona à Londres, ses nombreuses séances de désintox et sa reconstruction dans les Orcades où elle essaye de retrouver du travail et de se   sevrer. L’irrégularité évite d’ancrer l’addiction dans un schéma scénaristique irréaliste partant de l’alcoolisme jusqu’à la fin d’une désintox réussie. 
Les tentations auxquelles fait face Rona sont montrées par une opposition entre bleu et rouge. À l’image des pilules de Matrix, la protagoniste est régulièrement confrontée à deux choix : le bleu, métaphore de l’alcool présente dès le départ par sa couleur de cheveux, et ressurgissant parfois dans des fêtes ; puis le rouge, qui imprègnent sa coiffure à la fin, et les plans plus chaleureux du film. Le bleu ne disparaît jamais vraiment, à l’image de la mer que l’on aperçoit seulement à l’horizon. 
Les personnages secondaires sont eux assez bien écrits, notamment le père, lui aussi alcoolique, et la mère, qui n’a plus d’espoir que dans la religion. On pouvait redouter des protagonistes caricaturaux mais ils sont d’une justesse touchante et ne tombent jamais dans le pathos. Les thèmes abordés, loin d’être novateurs, bénéficient cependant d’un traitement et d’une attention intéressantes.

Lilia Penot

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