Lee Miller

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3–5 minutes

Nous vous conseillons vivement d’avoir vu le(s) film(s) traité(s) par nos textes, afin de ne pas être spoilé·es et de mieux comprendre nos propos !

3–5 minutes
FICHE TECHNIQUE

Réalisation : Ellen Kuras / Scénario : John Collee, Liz Hannah, Mario Hume / Musique : Alexandre Desplat / Décors : Gemma Jackson / Costumes : Michael O’Connor / Photographie : Pawel Edelman / Montage : Mikker E.G. Nielsen  / Maquillage : Ivana Primorac / Distribution : Entertainment One / Sociétés de production : MS Participations, Rocket Science, Hantz Motion Pictures, Sky, Pasaca Entertainment, Brouhaha Entertainment, Juggle Films Production, 55 Films et Vogue Studios
Interprétation : Kate Winslet, Andy Samberg, Alexander Skarsgard

Année de sortie : 2024

Le soleil des journées d’été, les amies et le vin, tout semble bien commencer pour Lee qui vit des vacances idylliques avec ses ami·es. Mais très vite elle se retrouve entre les grenades et les balles de la seconde guerre mondiale, lors de laquelle elle est reporter de guerre pour la branche britannique du magazine Vogue
On connaissait peut-être son nom, ou peut-être pas ; on connaissait parfois vaguement les grandes lignes de sa biographie. C’était un peu mon cas : j’avais quelques bribes d’informations sur la vie de Lee Miller, qui a entre autres marqué un tournant dans le photojournalisme. Je n’avais en tête que quelques informations abstraites, c’est tout, mais c’est apparemment déjà plus que tout ce que le film a à nous donner. 
Pourtant, Kate Winslet, qui est à l’origine du projet et qui joue la photographe elle-même, avait un terrain de jeu immense. La vie de Lee Miller fut complexe, pleine d’embuches, notamment dans son enfance durant laquelle elle subit un viol et voit son premier amour se noyer devant ses yeux. Ces situations ont un grand impact sur sa vie future : le choc post-traumatique la plonge dans la dépression et l’alcoolisme. 
Tout cela n’est pas traité par Ellen Kuras, qui ne se concentre que sur la vie de Miller durant la guerre, ne nous montrant que ce que l’on veut voir, quitte à laisser de côté la face sombre de son histoire. Les évènements relatés défilent chronologiquement dans une volonté d’amasser tous les moments impactant de la vie du personnage, mais sans être réellement ficelés autour d’une ligne scénaristique. 
Il est défendable de vouloir se concentrer sur la période de guerre, car il y a tant à dire, et il faut avouer que le film traite des évènements représentés avec détails. Mais on ne peut pas ignorer tout le pan affectif de la vie de Lee, dans la perspective où cette facette a construit sa sensibilité et a donc eu un fort impact sur la façon dont elle photographie la guerre.
Le scénario n’a pas su s’emparer du lien qu’il aurait pu faire entre les expériences qui l’ont construite et certaines scènes fortes qu’il représente, comme celle de la tentative de viol subie. 
C’est là pour moi la plus grande faiblesse du film : il veut cocher tous les canons du biopic sans jamais les transcender, donnant une désagréable impression de déjà-vu au/à la spectateur·ice1. On se perd dans sa volonté de sensationnalisme qui engendre une spectacularité de l’image, reprenant les codes du film de guerre avec des plans à la Dunkerque (Christopher Nolan, 2017). On y présente Lee comme une héroïne traversant les zones de combat dans des plans séquences qui se veulent grandioses mais qui font bailler de conformité. En parallèle, de grands discours surjoués sur l’horreur de la guerre enfoncent des portes ouvertes, le tout avec une voix off à la Titanic avec Lee à la place de Rose. Le sentimentalisme avec lequel est amorcé l’histoire est surenchéri par une BO instrumentale presque ridicule, dans une volonté de dépeindre tout le tragique de l’histoire. 
Tout cela donne le sentiment déplaisant d’être trompé·e par une histoire fantasmée sur la vie d’une femme réduite à son importance historique. Ce pseudo-féminisme montré à l’écran n’est pas représentatif de la profondeur de son engagement, et plus largement d’une vie bien plus complexe que ce que l’on veut bien nous montrer. Très peu de ses décisions ne sont pas dirigées, ou du moins influencées par les hommes qui l’entourent, depuis son compagnon Roland Penrose à son collègue David Sherman.
Les seuls éléments qui en valent vraiment la peine sont les photos originales de la photographe qui relatent avec hâte la fin de sa vie. Celles-ci sont amassées dans un générique de fin presque plus intéressant que le film en lui-même. Lee Miller est un biopic ennuyeux de conventions. Bien en ordre, les normes du genre défilent de l’une à l’autre comme les scènes passent du coq à l’âne. 

Maxime-Lou

1 Pour en savoir plus sur le biopic, consultez le dossier dédié à ce genre écrit par Lilia Penot.

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