Gladiator II

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3–4 minutes

Nous vous conseillons vivement d’avoir vu le(s) film(s) traité(s) par nos textes, afin de ne pas être spoilé·es et de mieux comprendre nos propos !

3–4 minutes
FICHE TECHNIQUE

Réalisation : Ridley Scott / Scénario : Peter Craig, David Scarpa, d’après des personnages de David Franzoni / Production : Ridley Scott, Walter Parkes, Michael Pruss, Douglas Wick, Lucy Fisher, David Franzoni, Aidan Elliott, Laurie MacDonald, Raymond Kirk / Maisons de production : Red Wagon Entertainment, Scott Free Productions, Paramount Pictures / Direction de la photographie : John Mathieson / Montage : Sam Restivo, Claire Simpson / Musique : Harry Gregson-Williams / Costumes : David Crossman, Janty Yates / Coiffure : Giuliano Mariano / Décors : Arthur Max, Jille Azis, Elli Griff / Maquillage : Jana Carboni / Production des effets visuels : Neil Corbould, Mark Bakowski / Casting : Kate Rhodes James
Interprétation : Paul Mescal, Connie Nielsen, Pedro Pascal, Denzel Washington

Année de sortie : 2024

Il faut y aller pour rire. Gladiator II est un peplum incrédible1, un remake nanaresque2 du premier Gladiator, et toute sa saveur est dans son ridicule. 
L’intrigue reprend à l’identique celle du volet de 2000. Un ancien soldat, après une défaite et le meurtre de sa femme, est emprisonné comme gladiateur et se sert de son influence grandissante auprès du peuple romain pour satisfaire sa vengeance. Lucius est courageux, honnête, juste. Il maîtrise ses émotions et la stratégie sur le terrain ; il garde ses colères et ses pleurs pour l’intime. À l’instar de son père caché (c’est un spoil que tout le monde aura vu venir), Maximus, il représente l’homme idéal selon des notions traditionnelles et conservatrices : plein de sang-froid, dévoué à sa famille, fort et courageux. Tous les obstacles, tous les combats, toute la structure narrative du film, reprennent presque à l’identique celles du premier. On retrouve même les musiques d’Hans Zimmer ; et le film va jusqu’à se citer par un flashback grisonnant rajeunissant Connie Nielsen, interprète de Lucilla, mère de Lucius.
Il y a des nuances à apporter cependant, des divergences entre les deux films qui résultent des presque 25 ans qui les séparent. Si le premier Gladiator a déjà visuellement mal vieilli, le second semble décrépi tant il est cheap3. Les plans sont sursaturés et monochromes, alternant le noir et blanc pour des séquences pseudo métaphysiques et le jaune moutarde des scènes de combats d’arènes. Et comme si ça ne suffisait pas, Gladiator II régale d’incohérences et d’anachronismes encore plus aberrants que les catapultes de l’incipit du film de 2000. Aux Naumachies4 déjà grandioses et exacerbées s’ajoutent des requins nageant sournoisement dans l’eau ; au lieu de féroces tigres les gladiateurs se battent contre des singes anthropomorphes et au rugissement félin. Loin de se prendre au sérieux et accumulant les excès, Gladiator II offre 2h30 de perplexité et d’hilarité désespérée mais sincère. 
S’y dessine en creux une évolution politique et sociale pourtant, trop légère et lisse pour être intéressante mais tout de même notable. La femme du protagoniste, bien qu’elle meurt vite et n’ait aucune identité, n’est plus femme au foyer mais soldate nullipare. Sa mort n’est plus un homicide passif mais la conséquence d’un combat glorieux. Cela reste évidemment faible, d’un féminisme libéral à l’excès avec un personnage si peu existant qu’on le croirait n’être là que pour les quotas, mais tout de même. Le rôle de Lucilla, déjà en potentiel dans le premier film, s’accroît. Plus intéressant (car très loin de moi l’idée de faire de Gladiator II un pamphlet féministe), le héros n’est plus un soldat romain contraint à l’exil mais un étranger conquis et chassé de sa terre et de sa nationalité. Des accents anticoloniaux et anti impérialistes se lisent en filigrane, sans devenir enjeu politique pour autant.
Gladiator II n’a pas vraiment d’intérêt cinématographique, scénaristique ou politique, mais il est encore plus amusant que le premier, et il offre un léger divertissement en ce froid mois de novembre.

Alex Dechaune

1 Le peplum est un genre cinématographique regroupant les films de reconstitution historique dont l’intrigue se déroule à l’Antiquité. 

2 Un nanar est un film excessivement et presque objectivement médiocre.

3 « Cheap », mot anglais, signifie « pauvre, de faible qualité » 

4 Les Naumachies, historiques, sont des spectacles Antiques reconstituant des batailles navales.  

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