La Répétition

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Nous vous conseillons vivement d’avoir vu le(s) film(s) traité(s) par nos textes, afin de ne pas être spoilé·es et de mieux comprendre nos propos !

FICHE TECHNIQUE

Réalisation : Catherine Corsini / Scénario : Catherine Corsini et Marc Syrigas / Musique : Daven Keller et Fabrice Dumont / Production déléguée : Philippe Martin et Vincent Meyer / Coproduction : Daniel Louis et Denise Robert / Photographie : Agnès Godard / Costumes : Martine Rapin / Montage : Sabine Mamou / Décors : François Abelanet 
Interprétation : Pascale Bussières (Louise), Emmanuelle Béart (Nathalie)

Année de sortie : 2001

La répétition danse un Tango psychologique : Louise court après Nathalie, amie d’enfance devenue comédienne, dont elle est amoureuse sans s’en rendre compte. Tango dans lequel les deux personnages se tournent autour en n’étant jamais sur la même longueur d’onde. Danse de laquelle émane une tension de fait inhérente à la relation. Sans oser franchir le mur de ses sentiments, Nathalie regarde Louise par le trou de la serrure.
Le traitement du lesbianisme des deux personnages ne s’impose pas comme sujet principal, élément notable pour un film de 2001. Cet amour n’y est presque jamais représenté à travers le sexe, contrairement à ce qu’on pouvait voir la même année dans Mulholland Drive de David Lynch. Ce dernier présente le lesbianisme à travers le corps dans son prétendu désir sexuel incontrôlable ; fétichisé par une réalisation qui essaie de faire coller le schéma d’une relation hétérosexuelle à l’amour dépeint entre deux femmes. Cette différence s’explique sûrement par l’homosexualité assumée de la réalisatrice.
Toutefois, on peut aujourd’hui questionner cette représentation lesbienne. Celle-ci est vue uniquement sous le prisme de la souffrance, de la jalousie et d’un enchaînement de malheurs subis par Louise. Cette relation n’est malheureusement pas non plus dénuée de figures masculines : le mari de Louise est toujours présent en toile de fond, tout comme les aventures de Nathalie. Ces figures complexifient la relation entre les deux personnages. Mais il existe des moyens scénaristiques permettant de rendre la relation ombrageuse. Il ne semble pas nécessaire que les femmes se trouvent sous le joug d’hommes qui devraient les protéger d’un lesbianisme « dangereux ».
Peut-on vraiment en vouloir à la réalisatrice ? La représentation du lesbianisme heureux est un sujet émergent dans les œuvres plus actuelles, notamment avec Portrait de la jeune fille en feu (Céline Sciamma, 2019) qui montre une relation dénuée de figure masculine, ou plus récemment encore avec Langue Etrangère de Claire Burger. Catherine Corsini évolue d’ailleurs avec son temps : en 2015 elle sort La belle saison qui traite du lesbianisme de façon  plus contemporaine.
Ce récit est construit, tel que le titre l’indique, par un enchaînement de « fuis moi je te suis, suis-moi je te fuis » créant un schéma extrêmement répétitif. On assiste à des allers et retours incessants, entre des moments  passés ensemble et des ruptures. Bien que cette répétitivité résulte assurément de la complexité de la relation, on s’en fatigue vite. Beaucoup de critiques 1 ont souligné leur lassitude lors du visionnage et je les rejoins sur ce point.
J’y vois le résultat d’une volonté commune à beaucoup d’œuvres indépendantes de créer un film original dans sa forme comme dans son fond. Cette œuvre est à l’image du cinéma français dit « de niche » : elle a de bonnes idées mais semble régie uniquement par le souhait de réinventer le cinéma, de créer une œuvre intelligente et déconcertante, tant dans son fond que dans sa forme. Dans cette volonté, elle oublie le·a spectateur·ice et son expérience de visionnage.  Il n’illustre, au final, que la prétention d’un cinéma français dit « d’auteur·ice » qui n’existe que dans la tête de ceux qui ont la prétention de s’y identifier.


1- Entre autres, L’Humanité : « La répétition finit par adopter les symptômes de la névrosité de Louise. Il tourne en rond. Et le spectateur avec […]» ; ou Les Echos qui marque « Et puis, la subtilité devient cliché, la perversité trouble manichéisme… répétitif, et l’on se lasse. »

Maxime-Lou

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